Dans la pénombre, une silhouette indécise qui s'approche dangereusement de l'inconnue. Et, bien trop rapidement pour lui permettre d'esquisser le moindre mouvement de défense, la silhouette lui empoigne fermement le cou. Deux mains fermes et glacées qui enserrent son cou si fort que son petit cœur se met à battre à une vitesse ahurissante et que ses tempes cognent atrocement contre les parois de son crâne. L’agressée se met alors à suffoquer, se tortille dans tous les sens, lutte de toutes ses petites forces pour ne pas perdre connaissance de peur de ne plus jamais se réveiller. Mais, face à un tel monstre de puissance, tenter de se défendre est superflu, futile. Face à lui, elles sont impuissantes. Et faibles, si faibles. Incroyablement faibles. Terriblement faibles. Irrémédiablement faibles. Et Satya déteste cela. Manquer de force, de vigueur, de ténacité. Ce sentiment atroce de ne pouvoir rien faire pour se défendre, d'être comme prise au piège. En proie à un violent et vicieux tourbillon. Entre le marteau et l'enclume. Au fil des secondes qui s'égrènent à une lenteur abominable, Satya sent que ses forces s'affaiblissent jusqu'à devenir presque inexistantes. Son teint est vite devenu rouge pivoine et se rapproche désormais dramatiquement de celui du blanc cadavérique. Et lorsque le manque d'air devient trop insupportable, lorsqu'elle sent que la vie est sur le point de la quitter, une violente secousse se produit alors dans son crâne.

En état de panique, tu tu t'extirpes violemment de tes songes, le souffle court. Ta respiration est erratique et tu sues à grosses gouttes. Tu n'a toujours pas repris l'ascendant sur ton corps, qui tremble frénétiquement, et as encore les yeux exorbités par l'expérience cruellement vivante tu viens d'éprouver.
Dans un bref moment d'accalmie, tu parviens à t'extraire de tes draps humides ; tu en profites pour commencer à faire quelques pas. Cependant, de brusques bouffées de chaleurs te saisissent et incendient ton corps tout entier. Tu stoppes tout mouvement. Une force invisible te vrilles ardemment le crâne. Une larme s'échappe de ses prunelles, une deuxième ne tarde pas à suivre. Elle tente d'attraper la boite de papiers mouchoirs qui se trouve sur sa table basse mais ses mains ne parviennent pas à tenir quoi que ce soit. Elle capitule. Après tout, à quoi bon ? Les larmes continuent de couler, finissant leur chute en s'aplatissant sur le plancher. Satya est dans un état second, en transe. Comme pour retourner un peu plus vite à la réalité, elle passe une main sur les bords de son lit et s'y cramponne aussi fort qu'elle le peut.
Soudain, d'autres visions refont surface dans sa tête. Le silence environnant laisse place à une succession de sons, de bruits, de hurlements qui lui font mal et la terrorisent. Elles ne sont maintenant plus dans la ruelle, mais dans une pièce exiguë, confinée, de laquelle une certaine moiteur se fait sentir. Brusquement, l'emprise effectuée sur son cou se libère. L'assaillant lui empoigne alors les cheveux et lui renverse la tête, qui manque de peu de heurter le mur. Des lueurs provenant de l'extérieur éclairent de temps à autres la pièce. Ainsi, lumière et obscurité s'alternent à un rythme rapide et régulier et - chaque fois que la lumière s'immisce - Satya entrevoit les traits de l'agresseur. Il a dans le regard cet étincelle, semblable à celle d'un prédateur féroce face à sa proie. Un sourire en coin carnassier étire son visage. Elle a envie de vomir. Elle voudrait crier, lui cracher à la figure et se débattre encore une fois de tout son corps frêle mais elle n'en fait rien. Le sourire animal du prédateur disparaît tout doucement. L'obscurité fait son retour dans la pièce. Est-ce le fruit de son imagination, des faits réels qui refont surface ? Elle ne le sait plus, elle hallucine. Elle se met à tourner en rond dans sa chambre tel un animal en cage. Son cœur tambourine dans sa cage thoracique et y frappe de plus en plus fort à chaque seconde qui s'écoule. Il la domine. Soudain, une douleur lancinante l'irradie toute entière tandis qu'elle sent une lame froide s'aventurer le long de son corps, monter de haut en bas, s'amuser à dessiner des formes imprécises avant de finalement remonter en direction de son cou. Et de le trancher, d'un coup sec et précis. De nouveau, sa poitrine se resserre. Satya finit par fondre silencieusement en sanglots, se laissant glisser le long d'un mur jusqu'à atteindre le sol froid et dur de sa chambre.